FATCA : la conformité fiscale américaine vue de Suisse
FATCA, acronyme de Foreign Account Tax Compliance Act, est une loi fédérale américaine adoptée en 2010 qui a des répercussions significatives sur les institutions financières du monde entier, y compris en Suisse. Son objectif principal est de lutter contre l'évasion fiscale par les contribuables américains ("US Persons") détenant des comptes financiers à l'étranger.
Qu'est-ce que FATCA ?
FATCA oblige les institutions financières étrangères (FFI - Foreign Financial Institutions), telles que les banques, les gestionnaires de fortune, les compagnies d'assurance ou certains fonds d'investissement situés hors des États-Unis, à :
- Identifier parmi leurs clients ceux qui sont considérés comme des "personnes américaines" (US Persons) selon les critères fiscaux américains.
- Déclarer annuellement des informations sur les comptes financiers détenus directement ou indirectement par ces personnes américaines à l'autorité fiscale américaine, l'Internal Revenue Service (IRS).
Si une institution financière étrangère refuse de se conformer à FATCA, elle s'expose à une retenue à la source punitive de 30% sur certains paiements de source américaine (comme les intérêts et dividendes américains) qu'elle reçoit pour son propre compte ou pour celui de ses clients.
Pourquoi FATCA a-t-il été créé ?
Le gouvernement américain a constaté que de nombreux citoyens et résidents américains utilisaient des comptes à l'étranger pour dissimuler des revenus et des actifs à l'IRS. FATCA vise à rendre cette pratique beaucoup plus difficile en obligeant les institutions étrangères à jouer un rôle actif dans l'identification et la déclaration de ces comptes.
Qui est considéré comme une "US Person" selon FATCA ?
La définition est large et inclut notamment :
- Les citoyens américains, même s'ils résident à l'étranger et possèdent une autre nationalité (double nationalité).
- Les résidents permanents légaux des États-Unis (détenteurs d'une "Green Card").
- Les personnes remplissant le critère de présence substantielle ("Substantial Presence Test") aux États-Unis sur une période donnée.
- Certaines entités juridiques (sociétés, trusts...) détenues majoritairement par des personnes américaines.
De nombreux "Américains accidentels" (personnes nées aux États-Unis mais ayant vécu ailleurs toute leur vie, ou personnes ayant hérité de la nationalité sans en avoir conscience) peuvent être concernés.
L'accord FATCA entre la Suisse et les États-Unis
Pour faciliter la mise en œuvre de FATCA et tenir compte des lois suisses sur la protection des données et le secret bancaire (dans sa portée résiduelle), la Suisse a conclu un accord intergouvernemental (IGA - Intergovernmental Agreement) avec les États-Unis. La Suisse a opté pour le Modèle 2 de l'IGA.
Fonctionnement sous le Modèle 2 :
- Identification : Les institutions financières suisses identifient les comptes détenus par des personnes américaines selon les procédures de diligence convenues.
- Demande de consentement : Elles doivent demander le consentement de leurs clients américains pour pouvoir transmettre leurs informations directement à l'IRS.
- Déclaration directe (avec consentement) : Si le client consent, l'institution suisse déclare les informations requises (identité du client, numéro de compte, solde, revenus...) directement à l'IRS annuellement.
- Déclaration agrégée (sans consentement) : Si le client refuse de donner son consentement, l'institution suisse ne peut pas transmettre les informations nominatives directement. Elle doit alors déclarer à l'IRS uniquement le nombre et le montant total agrégé de ces comptes non consentants.
- Demande groupée de l'IRS : Sur la base de ces informations agrégées, l'IRS peut ensuite adresser une demande d'assistance administrative groupée aux autorités suisses (Administration fédérale des contributions - AFC) pour obtenir les informations spécifiques sur ces clients non consentants, conformément aux procédures prévues par la convention de double imposition entre la Suisse et les États-Unis.
Implications pour les institutions financières suisses
FATCA impose des obligations administratives lourdes et coûteuses aux institutions financières suisses :
- Mise en place de procédures complexes d'identification et de diligence raisonnable ("due diligence").
- Adaptation des systèmes informatiques pour la collecte et la transmission des données.
- Gestion des consentements et des déclarations (directes ou agrégées).
- Formation du personnel.
- Risque de pénalités (retenue à la source de 30%) en cas de non-conformité.
Implications pour les clients (US Persons)
- Les personnes américaines détenant des comptes en Suisse sont contactées par leur banque pour fournir des informations (formulaire W-9, numéro d'identification fiscale US - TIN) et donner leur consentement à la déclaration.
- Un refus de coopérer ou de fournir les informations peut entraîner la clôture du compte par l'institution financière, car celle-ci ne veut pas s'exposer au risque de non-conformité.
- Les informations transmises à l'IRS permettent à ce dernier de vérifier que les contribuables américains respectent leurs obligations fiscales aux États-Unis concernant leurs avoirs et revenus mondiaux. Voir aussi Résident Fiscal.
FATCA et l'EAR : des objectifs similaires, des mécanismes différents
FATCA est une initiative américaine, tandis que l'Échange Automatique de Renseignements (EAR) est une norme mondiale de l'OCDE à laquelle la Suisse participe également. Les deux visent la transparence fiscale internationale, mais fonctionnent différemment :
- FATCA : Focalisé sur les "US Persons", mécanisme basé sur la déclaration directe par les institutions (avec consentement ou via demande groupée) à l'IRS.
- EAR : Échange réciproque et automatique d'informations entre les administrations fiscales des pays participants, concernant les résidents fiscaux de ces pays.
Un changement profond dans la banque internationale
FATCA a été un catalyseur majeur dans le mouvement mondial vers une plus grande transparence fiscale. Pour la Suisse, cela a nécessité une adaptation significative de son secteur financier et a contribué, avec l'EAR, à redéfinir les contours du secret bancaire. Les institutions financières suisses sont désormais des partenaires actifs dans la transmission d'informations fiscales aux autorités américaines concernant leurs clients "US Persons".